Date : mardi 29 avril 2025
Horaire : de 8h45 à 18h
En présentiel : CAREP Paris : 12, rue Raymond Aron 75013 Paris
À distance : en s’inscrivant via le bouton « Inscription à la visioconférence »
Organisateurs : Salam Kawakibi, Leila Seurat et Isabel Ruck (CAREP Paris) ; Jérôme Bocquet et Romeo Carabelli (Université de Tours/EMAM).
ARGUMENTAIRE
L’histoire et le patrimoine ont toujours été des terrains d’affrontement idéologique et politique. En Syrie, sous la dynastie des Assad, le régime baathiste a instrumentalisé l’histoire et l’archéologie pour asseoir sa légitimité, façonnant une identité nationale au service du contrôle politique. La mise en récit du passé, notamment à travers les manuels scolaires et les politiques patrimoniales, a ainsi contribué à effacer la diversité des appartenances et des identifications.
La chute du régime soulève aujourd’hui de nombreuses questions : comment se départir de ces usages politiques de l’histoire ? Quel rôle l’historien peut-il jouer dans cette phase de transition ? Comment repenser l’articulation entre cadre politique et écriture de l’histoire ? Quel modèle étatique permettrait une appropriation inclusive du récit national, ouverte à tous les segments de la société ?
Dans ce contexte de transition, cette journée d’étude vise à explorer comment l’histoire et le patrimoine peuvent être mobilisés pour accompagner la reconstruction de la société syrienne. Adoptant une approche pluridisciplinaire, elle réunira historiens, anthropologues, archéologues, politistes et acteurs de terrain. Elle invite à interroger la question mémorielle à la fois comme un objet des sciences sociales et comme un enjeu central de la refondation du lien social et politique en Syrie.
PROGRAMME
8h45 | Accueil des participants
9h00 – 9h30 | Mot de bienvenue
- Salam Kawakibi, Directeur du CAREP Paris
- Romeo Carabelli, directeur de l’équipe EMAM (UMR 7324 CITERES – CNRS / université de Tours) et des Cahiers d’EMAM (incl. Introduction au numéro spécial)
9h30 – 11h00 | Panel 1 Patrimoine : enjeux, préservation et archéologie de coopération
Modération : Annie Sartre-Fauriat, CREHS-Université d’Artois
Depuis 2011 le patrimoine archéologique en Syrie a été au centre de l’attention médiatique (Palmyre-Daech vs régime). A partir de notre réflexion autour de l’instrumentalisation du patrimoine, ce panel vise à questionner les usages et mésusages de l’archéologie et à examiner les enjeux de la préservation du patrimoine en Syrie. Plusieurs axes seront envisagés : dresser un bref état des lieux des dégradations et des pillages et trafics d’antiquités ; analyser les diverses stratégies de conservation et de restauration via des projets nationaux et internationaux de sauvegarde ; penser la place de ce patrimoine dans les efforts de reconstruction du pays en interrogeant la notion d’archéologie de coopération.
Intervenants :
- Pierre-Marie Blanc, CNRS : Bosra, ville antique au sortir de la guerre syrienne, quel avenir?
- Sophie Cluzan, musée Louvre
- Michel al-Maqdiss, musée du Louvre
11h-12h30 | Panel 2 Destruction de l’héritage culturel
Modération : Jérôme Bocquet, université de Tours/ Citeres-EMAM
Le génocide culturel est l’éradication systématique d’un patrimoine dans le but d’effacer l’existence et la mémoire d’un peuple. Cette qualification se pose avec une acuité toute particulière dans un pays où l’idéologie baathiste a systématiquement été mobilisée pour écraser toute formes d’appartenances et d’expression des particularismes. Revenant sur l’instrumentalisation de l’histoire et du patrimoine, ce panel, composé d’anthropologues, d’historiens et d’urbanistes interroge la pertinence d’une telle notion dans le contexte syrien.
Intervenants :
- Mathilde Ayoub, Cergy Paris Université / Institut National du Patrimoine : En Syrie, les statues meurent aussi ?
- Maurice Sartre, HiSOMA Lyon (Maison de l’Orient)
- Laurence Gillot, université Paris Cité : Écriture et réécriture de l’histoire des ruines de Palmyre
- Abdalrazzaq Moaz, université de Cologne : La vision du patrimoine cultural en Syrie
12h30 – 14h | Pause déjeuner
14h – 15h30 | Panel 3 Anéantissement des corps et quête de justice
Modération : Ziad Majed, université américaine de Paris
L’histoire de cette destruction est indissociable de l’anéantissement des corps, faisant de la Syrie un cas d’école en matière de torture et de disparitions forcées. Ce panel se propose d’examiner les dimensions historiques et anthropologiques de cette violence, ainsi que la place centrale qui devrait lui être accordée dans la Syrie de demain. Il explorera également les dynamiques mémorielles et les mécanismes de justice susceptibles de répondre aux attentes des victimes. La gestion des archives, des témoignages et des lieux de mémoire sera abordée comme un enjeu essentiel de la réconciliation nationale. Alors que la justice transitionnelle occupe une place croissante dans les débats occidentaux, qu’en pensent les Syriens eux-mêmes ? Quels usages souhaitent-ils faire de cette mémoire ? Comment dialoguent-ils avec la diaspora sur ces questions fondamentales ?
Intervenants :
- Joël Hubrecht, Institut des Études et de la recherche sur le droit et la justice (IERDJ) : Juger en Syrie les crimes de la dictature : tensions, incertitudes et espoirs
- Véronique Nahoum Grappe, EHESS
- Habib Nassar, Institution indépendante pour les personnes disparues en Syrie : La justice transitionnelle : de la rhétorique à la pratique
- Almoutassim Al Kilani, HEICR : Justice transitionnelle, crimes les plus marquants et proposition d’un « modèle syrien »
15h30 – 16h | Pause-café
16h – 17h30 | Panel 4 Imaginer de nouvelles fondations politiques
Modération : Salam Kawakibi, CAREP Paris
La reconstruction physique et mémorielle est indissociable de la reconstruction politique et sociale. S’il est encore trop tôt pour juger le nouveau pouvoir, certains traits de l’administration en place à Damas se dessinent déjà : un appel au dialogue national excluant de nombreux acteurs, une inclusion de personnalités sans considération pour les partis et les institutions, ainsi qu’un recours à la cooptation.
Comment éviter la répétition des erreurs du passé, notamment en matière de contrôle et d’exclusion politique ? Les expériences de transition politique ailleurs dans le monde peuvent-elles éclairer le chemin vers une transition réussie en Syrie ?
Intervenants :
- Leïla Vignal, ENS Paris
- Joseph Daher, chercheur indépendant : Défis et perspectives pour l’économie syrienne
- Zakaria Taha, université Grenoble Alpes : Syrie post-Assad : vers une reconfiguration du paysage politico-religieux ? défis et enjeux
- Leyla Dakhli, CNRS
17h30 – 18h | Conclusions de la journée
Par Maurice Sartre, HiSOMA Lyon (Maison de l’Orient)