Table ronde organisée par le Centre arabe de recherches et d’études politiques de Paris (CAREP Paris).
- Date : 14 novembre 2022
- Horaire : 13h45-17h30
- En présentiel : CAREP Paris : 12, rue Raymond Aron 75013 Paris
- A distance : en s’inscrivant sur zoom via le bouton « s’inscrire à la visioconférence »
Argumentaire
Il n’y a pas de pratique sportive plus médiatisée que le football. Elle harangue les foules dans les stades, déchaîne les passions des supporteurs et défraye les chroniques au point d’avoir atteint le statut d’objet de recherche (Boniface, 1999). Ce sport est l’exemple type d’une pratique qui s’inscrit dans la mondialisation à partir des années 1930, date de la première Coupe du monde. Le foot est, par conséquent, rapidement devenu un enjeu politique et social. Il mobilise les masses et il est le moyen par lequel s’affirme une identité nationale comme le montre le Maroc après l’indépendance : le roi Hassan II crée l’Association sportive des Forces armées royales (FAR) qui symbolise le mélange du pouvoir et des militaires dans le football (Abis & Ajmani, 2014) dès 1959, soit trois ans après l’indépendance du pays. Le foot apparaît alors comme une superstructure, un « opium du peuple », qui permet aux régimes autoritaires arabes de contrôler et contenir les expressions contestataires.
Inversement, le foot constitue aussi un moyen d’affirmation des particularismes identitaires qui émanent des sociétés. Ceux-ci peuvent être en lien à la fois avec des histoires familiales et locales comme dans le cas du Qatar (Le Magoariec, 2021), qu’avec des pratiques contestataires du Hirak algérien (Belkaïd, 2020) ou encore des pratiques contre-révolutionnaires comme celles des Ultras en Égypte (Gibril, 2019). Plus récemment encore, le foot devient aussi un moyen d’émancipation pour des minorités, notamment les femmes arabes. Autrement dit, le sport est un espace politique, où les discours et les pratiques contestataires sont tolérés, là où les manifestations pourraient être réprimées dans la rue.
Mais cette analyse du football comme relais des revendications ne doit pas, pour autant, cacher les dimensions économiques (économie du foot, ouverture d’un marché, etc.) et diplomatiques (soft power, politique de l’image, légitimation, etc.), souvent moins visibles. L’objectif de cette table ronde sera donc de questionner la multiplicité de ces enjeux tout en analysant la manière dont ils interagissent entre eux, voire parfois entrent en contradiction.
Programme de la journée
13h45 Accueil des participants
13h55 Mot de bienvenue
14h00 Discours d’ouverture par Carl ROMMEL, Uppsala University (intervention en anglais via ZOOM) :
Le foot dans le monde arabe : émotion, masculinité et contestation
14h15-16h15 Table-ronde entre chercheurs, modérée par Nabil Ennasri
Intervenants :
- Suzan GIBRIL, Université Libre de Bruxelles : Foot et politiques contestataires : le cas des « Ultras » en Égypte
- Akram BELKAÏD, Le Monde diplomatique : Le foot au cœur de la contestation en Algérie
- Raphaël LE MAGOARIEC, Université de Tours : Le football au Qatar : de la régulation de conflits familiaux à l’influence internationale
16h15-16h30 Pause café
16h30-17h15 Débat avec le public
17h15 Conclusions
Biographies des intervenants
Akram BELKAÏD
Akram Belkaïd est journaliste au Monde diplomatique et membre du comité de rédaction du site Orient XXI.
Nabil Ennasri
Nabil Ennasri est docteur en science politique, spécialiste de la région du Golfe et directeur de l’Observatoire du Qatar. Il est aussi l’auteur de l’ouvrage L’énigme du Qatar (Armand Colin, 2013).
Suzan GIBRIL
Suzan Gibril est une chercheuse post-doc FRS-FNRS, affiliée à OMAM, STRIGES et au Cevipol à l’Université libre de Bruxelles (ULB). Ses domaines d’expertise englobent l’analyse des outils de résistance et d’opposition au Moyen-Orient, notamment à travers l’utilisation de la sphère culturelle (musique, street art et graffiti, arts du spectacle), ainsi que les liens entre action collective et dynamiques de pouvoir. Elle a notamment publié « Shifting spaces of contention: An analysis of the Ultras mobilization in Revolutionary Egypt » (2018), in European Journal of Turkish Studies ; ou encore « Contentious politics and bottom-up mobilisation in revolutionary Egypt: The case of Egyptian football supporters » in GERGES, F. (ed.), Contentious Politics in the Middle East, London, Palgrave (2015).
Raphaël LE MAGOARIEC
Raphaël Le Magoariec est doctorant en géopolitique rattaché à l’Équipe Monde arabe et Méditerranée (EMAM ; université de Tours). Ses travaux portent sur les monarchies du Golfe et le sport représente pour lui un angle d’étude pour traiter de leurs enjeux de pouvoir à plusieurs échelles. Son projet de recherche initié au début des années 2010 autour du Qatar, à l’occasion d’un master à l’INALCO, a ensuite été élargi à l’ensemble des pays du CCG. Il est auteur de L’Empire du Qatar : Le nouveau maître du jeu ? (avec Nabil Ennasri, octobre 2022).
Carl ROMMEL
Carl Rommel est anthropologue, diplômé de la SOAS, Université de Londres en 2015 et actuellement chercheur à l’Université d’Uppsala en Suède. Sa recherche doctorale explore la politique émotionnelle du football égyptien avant et après la révolution de janvier 2011. En tant que post-doctorant, il était affilié au projet Crosslocations financé par l’ERC à l’Université d’Helsinki. Ses recherches sur le terrain au Caire interrogent les intersections entre la précarité, la masculinité, la temporalité et l’espace urbain. Il est notamment l’auteur d’un livre de référence sur le football en Égypte intitulé Egypt’s Football Revolution: Emotion, Masculinity and Uneasy Politics (Austin, Texas University Press, 2021).