Table ronde organisée par le Centre arabe de recherches et d’études politiques de Paris (CAREP Paris), en partenariat avec l’Université Paris Cité, le Laboratoire du Changement Social et Politique (Université Paris Diderot) et la revue Tumultes.
- Date : 8 décembre 2022
- Horaire : 14h-18h
- En présentiel : CAREP Paris : 12, rue Raymond Aron 75013 Paris
- A distance : en s’inscrivant sur zoom via le bouton « s’inscrire à la visioconférence »
- Langues : Français / Anglais
Argumentaire
Dès les années 1970, Talal Asad et Edward Saïd avaient montré comment la culture mais aussi les sciences sociales avaient, souvent à leur insu, contribué à la domination coloniale. Alors que les diverses sciences sociales, mais aussi la philosophie et le droit, se présentaient comme fondamentalement non-politiques parce que relevant de la pure rationalité, elles servaient aussi parfois de masque et de justification à la domination, en particulier la domination coloniale.
À partir du XIXe siècle, un seul mode de connaissance s’est imposé comme le seul véritable savoir : la pensée occidentale, ce qui permet aujourd’hui de parler d’injustice épistémique. L’extension de la domination coloniale à la science ne s’exprimait pas seulement par le contrôle de la pensée, mais aussi par la confiscation des imaginaires des populations locales, qui étaient entièrement monopolisés sinon contrôlés par les Européens et la machine de guerre coloniale (Djerbal, 2022). On peut se demander si cette vision a fondamentalement changé.
S’inscrivant dans la lignée des études post-coloniales, cette table ronde repose sur le souci de rendre visible ce lien entre sciences sociales au sens large et domination coloniale, dans les interstices, les métaphores, les non-dits, les impensés. Car force est de constater que la colonisation a laissé derrière elle des savoirs et des pratiques contraignant les représentations occidentales (Jacques Berque, 1965). Ensemble, ils font de la traduction épistémologique de la colonisation, ce qu’on appelle aujourd’hui la « colonialité du savoir », un élément structurant mais désormais interrogé et contesté des évolutions scientifiques à venir.
Programme de la table ronde
14h00 I Accueil des participants
14h10 – 14h30 I Mot de bienvenue et présentation par Sonia DAYAN-HERZBRUN (Université Paris Cité)
14h30 – 15h00 I Discours d’ouverture par Elizabeth THOMPSON, American University : Manufacturing memory : The colonial construction of Islam against democracy
15h00 – 17h00 I Table ronde modérée par Warda HADJAB (EHESS)
Intervenants :
- Malek BOUYAHIA, Université Paris 8 : L’avenant colonial au contrat social
- Aïssa KADRI, Professeur honoraire à l’Université Paris 8 : Pierre Bourdieu, le temps de l’Algérie
- Salim CHENA, CNRS/ Sciences Po Bordeaux : Critique de la critique du hirak ou Comment réifier la citoyenneté des Algérien.ne.s
- Bernadette SAOU-DUFRENE, Université Paris 8 : Impensé patrimonial et régimes d’historicité : les monuments d’Alger
17h00-17h15 I Pause-café
17h15-18h00 I Débat avec le public
18h00 I Conclusions par Isabel RUCK (CAREP)
Biographies des intervenants
Sonia Dayan-Herzbrun est professeure émérite en sociologie politique et en études féministes à l’Université de Paris. Auteure de nombreux ouvrages et articles, elle dirige la revue Tumultes, dont beaucoup de numéros ont été consacrés à la question des appartenances, au sentiment national, aux mouvements insurrectionnels et aux formes multiples de l’aspiration démocratique. Elle est membre de l’Association internationale des sociologues de langue française et de la Caribbean Philosophical Association qui lui a décerné en 2016 le prix Frantz Fanon pour l’ensemble de son œuvre et de sa carrière.
Elizabeth F. Thompson est professeure d’histoire et titulaire de la chaire Mohamed Said Farsi de paix islamique à l’Université américaine de Washington, DC.
Malek Bouyahia est docteur en science politique et membre associé au Centre de recherches sociologiques et politiques de Paris (CRESPPA-GTM). Ses recherches s’inscrivent dans le sillage des études postcoloniales. Elles portent sur l’histoire des idées politiques en situation coloniale et plus spécifiquement sur l’Algérie. Il a co-dirigé en 2021, avec Franck Freitas-Ekué et Karima Ramdani, Penser avec Stuart Hall aux éditions La Dispute.
Warda Hadjab est diplômée d’un doctorat en sociologie de l’EHESS, elle est actuellement chercheuse postdoctorale au sein du projet AgorAkademi (Cespra EHESS-Nomis Foundation). Soutenue en décembre 2021, sa thèse « Amour, mariage halal et célibat musulman. Étude des pratiques conjugales de la diaspora maghrébine en France » a obtenu le Prix Rémy Leveau 2022 de la meilleure thèse en sciences humaines et sociales sur l’islam en France et en Europe.
Aïssa Kadri est professeur honoraire de sociologie à l’Université Paris 8 et ancien directeur de l’Institut Maghreb Europe. Ses recherches portent sur les migrations au Maghreb, en lien avec la question des droits de l’homme.
Salim Chena est chercheur associé au laboratoire Les Afriques dans le Monde (CNRS/Sciences Po Bordeaux). Diplômé de Sciences Po Bordeaux, il est aussi un membre fondateur de la revue en ligne Dynamiques internationales. Ses travaux portent sur les migrations et l’asile au Maghreb, la politique internationale dans l’aire maghrébo-sahélienne et la philosophie sociale.
Bernadette N. Saou-Dufrène est professeur des universités, Paris 10 – Nanterre, responsable des nouvelles formations autour du patrimoine, de la muséologie et du numérique (en 2012). Elle est chercheuse au Centre d’études et de recherche sur les expositions et les musées et enseigne les sciences de l’information et de la communication à l’Université Pierre Mendès France, Grenoble 2.