Depuis une dizaine d’années, la question de la transition démocratique occupe une place centrale dans les travaux du Centre arabe. Elle est même devenue un champ d’études à part entière, auquel le centre a consacré un nombre important de colloques, séminaires, ouvrages et numéros de revues. Dans ce cadre, nous signalons la parution récente de deux ouvrages collectifs sur le sujet  :

Après les révolutions arabes : repenser la théorie de la transition démocratique

Cet ouvrage compile une série d’essais critiques portant sur les théories de la transition démocratique, éclairés par les expériences arabes qui ont marqué les révolutions de 2011. Alors que ces soulèvements ont démonté plusieurs postulats du modèle de transition traditionnel, le livre remet également en question l’idée reçue selon laquelle la région arabe ne contribuerait pas de manière originale aux sciences sociales, contrairement à d’autres régions telles que l’Amérique latine, reconnue pour ses contributions aux théories de la dépendance et de la transition démocratique. Ainsi, cet ouvrage démontre que le monde arabe apporte des contributions significatives, tant sur le plan théorique que par les enseignements tirés de ses expériences et transformations. Ces contributions enrichissent le débat global sur la démocratie et les processus de transition démocratique, introduisant de nouvelles variables pour expliquer les défis auxquels font face même les démocraties consolidées hors de cette région, comme l’émergence du populisme et son effet sur l’érosion démocratique en Occident.

Le livre aborde un certain nombre de questions clés, telles que : la révision du modèle de transition à la lumière des révolutions arabes de 2011 ; examiner la dynamique interne et la concurrence entre les élites avant, pendant et après la transition ; Le rôle des institutions sécuritaires et militaires et les défis de leur réforme et de leur intégration dans le processus démocratique ; La place de la religion et des mouvements islamiques ; L’importance du facteur externe pour faciliter ou entraver la transition ; Les problèmes de transition du point de vue de la centralité coloniale occidentale ; Les dilemmes de l’appréhension, de la modération et de l’ambiguïté de la transition ; Le phénomène de contre-révolution et le débat sur le rôle de ceux qui détournent les révolutions ; L’impact de la diversité des formes de régimes autoritaires sur la pérennité de la tyrannie ou les changements qui suivent sa chute… etc.

Anthologie d’essais sur la transition démocratique

Cette anthologie réunit vingt-deux articles essentiels portant sur l’étude de la transition démocratique, traduits en arabe et accompagnés de commentaires et de notes explicatives. Allant au-delà de la simple traduction, cette initiative vise à fournir aux étudiants et chercheurs arabes les outils analytiques et conceptuels indispensables pour comprendre les théories, les débats et les études de cas qui ont marqué et influencé les recherches sur la transition depuis les années 1960. L’ACRPS (Centre arabe de recherches et d’études politiques, Doha), par le biais de cette publication, s’engage à enrichir le domaine des études sur la transition démocratique dans le monde arabe. Cette démarche devrait toucher non seulement les universitaires, mais aussi les acteurs politiques et civils impliqués dans les dynamiques de la démocratie et de sa transition, tels que les activistes, les professionnels expérimentés des sphères politiques, médiatiques et culturelles, ainsi qu’un public plus large aspirant à la démocratie.

Les auteurs des articles de ce recueil appartiennent à divers courants dans le domaine des études sur la transition et représentent deux générations distinctes. La première génération, qui a publié ses travaux au milieu du XXe siècle, inclut des figures telles que Dankwart Rustow (1924-1996), Guillermo O’Donnell (1936-2011), Philippe Schmitter (né en 1936), Samuel Huntington (1927-2008), Seymour Martin Lipset (1922-2006) et d’autres. La seconde génération, active à la fin des années 1980 et au début des années 1990, compte des penseurs tels que Richard Snyder, Alfred Stepan (1936-2017), Terry Lynn Karl, Nancy Bermeo, Doh Chull Shin et Thomas Carothers, accompagnés de chercheurs plus récents. Les articles sont méthodiquement organisés de manière chronologique, reflétant ainsi l’évolution du domaine sur près d’un demi-siècle.

Rendre ces travaux accessibles constitue en effet une contribution significative à la diffusion des connaissances et à la stimulation du débat intellectuel dans le monde arabe sur des sujets d’une importance capitale pour son avenir politique et social.